En tête
Baudrier ajusté. Dégaines
fixées. Où est ma vache ?
-Cyril, file-moi ma vache !
-Tiens ! T’es chaud pour un
6a ?
Un regard vers le début de
paroi déversant : « Prendre ses gendres à son cou » est écrit en rouge
sang.
-Ouais, on va quand même prendre
un bout de brioche avant. C’est peut-être le dernier.
Il a un sourire d’une oreille
à l’autre. Je retourne à mon sac, y plonge la main dedans. Je sens
la rugosité du papier aluminium. Je le sors. Il étincelle d’une
lumière argentée au soleil.
J’ouvre le paquet dans un
bruissement. L’odeur de miel en émane ainsi qu’un parfum d’épices.
On partage une tranche dorée. On la savoure doucement. Tiens, Cyril
se l’aie déjà enfilée ! Il observe la rivière en contrebas. Je
finis mon bout de gâteau. J’attrape la bouteille d’eau gazeuse.
Elle pétille déjà moins.
-Bon je me lance
-Tu peux y aller je t’assure
Premier pas. Difficile. Des
prises de main gauche en inversées mais aucune à droite ni pour les
pieds. Le premier clou à 1.5m du sol parait inutile. Je me lance. Adhérence.
Equilibre. Je pousse sur les pieds pour chopper un bac à droite. En
fait c’est pas un bac. Je vais chercher une écaille au-dessus de
la main gauche. Une dégaine dans le deuxième clou. Sauvé !
Escalier jusqu’aux deux prochains
clous puis un pas difficile. Cette voie est déjà connue. Le bras tendu,
la prise est à 50 cm. Caler le pied gauche à plat sur une arrête
verticale à hauteur des hanches. En poussant dessus, la prise de main
reste à 10 petits centimètres. Faire une adhérence dans la concave
où je me trouve. On tente. On dépasse le clou.
Sensations instables. Pied
droit en partance. Impression de se vaporiser. L’air se détend. En
attente de plomb. Hésitation avant de faire un mouvement. Equilibre
précaire.
Un nuage passe.
-On est à la limite du soleil
-SEC !
Me sentant glisser, je vais
chercher la prise clé par instinct. Ca tient. Il reste à tirer dessus
pour atteindre la chaîne. Pas aisé après le dernier pas. Je crochète
ma longe. Double huit. Mousqueton. Descente. Cyril m’arête à chaque
dégaine que je récupère. J’atterris. Mon équipier frissonne. Mon
cœur résonne, l’adrénaline dans les veines : je me sens bien.